Animal de légende, la chauve-souris qui fascine ou rebute est absolument nécessaire à l’écosystème. En France, elle est protégée et fait l’objet d’une spécialisation depuis plus de trente ans du Museum d’histoire naturelle de Bourges. C’est en ce lieu que j’ai eu la chance d’approcher l’incroyable animal qu’est la chauve-souris car il y a celles qui pendouillent la tête en bas… celles qui vivent resserrées les unes contre les autres… Celles qui aiment les caves comme le rhinolophe que l’on trouve en France… Celles qui pèsent à peine quelques grammes et celles qui ressembleraient presque à Batman…

Salle consacrée à la chauve souris au Museum de Bourges

Un long travail de sensibilisation

Salle consacrée à la chauve souris au Museum de Bourges - squelette

Oeuvrant, de façon globale, dans une démarche durable et responsable https://lesvoyagesdeberengere.com/museum-histoire-naturelle-de-bourges/6k7f6u2bd/cote-musee/, le Museum de Bourges, avec à sa direction Sébastien Minchin, répond directement aux gens paniqués par le petit mammifère qu’ils viennent de découvrir dans leur demeure.

Car, tous les milieux peuvent avoir à faire avec ce mammifère puisque dès qu’il y a des joints de dilatations, il peut y avoir des chauves-souris.

Le département du Cher compte à lui seul 1540 colonies recensées.

Le Museum reçoit une trentaine d’appels par jour.

Le Museum intéresse chacun à l’animal, à son fonctionnement et à sa fonction dans la biodiversité, dédiabolisant le petit mammifère.

Cette sensibilisation, particulièrement pédagogique délivrée avec patience et persévérance par les spécialistes de la question au Museum, incite souvent le nouvel initié à en parler naturellement autour de lui, et à venir au Museum comprendre encore mieux qui est la chauve-souris en visitant tout l’étage qui lui est entièrement consacrée.

Se passionner pour la chauve-souris

En charge de ce département dévolu à l’animal depuis 1989, Amélie Chrétien est devenue chiroptérologue, littéralement à la fois par accident et par passion.

Ingénieur en environnement, de formation, diplômée en 2017, la jeune femme recherchait un travail quand, un soir vers 23 heures, rentrant chez elle au volant de sa voiture, elle tape involontairement une chauve-souris, qu’elle retrouva morte le lendemain matin, sur le véhicule.

Emue, elle ne voulut pas jeter le petit corps à la poubelle et contacta le Museum de Bourges. Son interlocuteur lui proposa de venir rapporter l’animal.

Au Museum, Amélie rencontre un responsable qui lui parle de la chauve-souris. Amélie se passionne immédiatement pour l’animal et intègre le musée cinq jours plus tard pour se former.

Centre de soins pour chauve-souris - Museum de Bourges

Le centre de soins associé au Muséum accueille une centaine de chauves-souris par an.

Lorsqu’elles ont retrouvé leurs forces, elles font régulièrement des vols en intérieur pour mesurer leur capacité d’indépendance et voir si elles peuvent être relâchées comme les deux pipistrelles, le grand murin ou encore la noctule que j’ai eu la possibilité de photographier lors de ma venue.

Un incroyable mammifère

Amélie Chrétien me précise d’emblée : « Nous l’imaginons oiseau alors que c’est un mammifère. »

Ses petits naissent les yeux fermés et la mère les allaite.

D’ailleurs, elle n’en a qu’un à la fois qu’elle porte tout contre son ventre quand elle vole.

Elle se reproduit en automne, mâles et femelles se retrouvant dans des sites temporaires pour ce temps de l’accouplement.

Mais, la femelle gardera le sperme tout l’hiver pendant l’hibernation et déclenchera la fécondation lorsque les conditions météorologiques seront favorables à sa gestation vers le début du printemps.

A partir de mars, les femelles se regroupent ensemble dans les mêmes endroits pour la gestation et la mise bas.

Les naissances auront lieu de début juin à la mi-juillet et les petits restent deux mois avec leur mère.

Vers la mi-août quand les petits volent, tout le monde quitte l’endroit de gestation et de mise bas.

La chauve-souris : une apparence et un squelette étonnants

planche chauve-souris- Bérengère Desmettre

Ce petit animal, de son nom scientifique chiroptera, dort 20 heures par jour soit la tête en bas, soit bien serré contre ses congénères.

Certaines espèces sont migratrices, toutes hibernent.

Doué du vol actif, à distinguer du vol plané des écureuils par exemple, la chauve-souris se déplace dans les airs grâce à ses ailes formées d’une membrane de peau entre le corps, les membres et les doigts.

Son squelette est très proche de celui de l’homme.

Les différences tiennent à la longueur de ses doigts, à la grande membrane fine et délicate les reliant, ainsi qu’à la rotation vers l’arrière des membres inférieurs, ce qui facilite l’accrochage et la capture de la nourriture.

Son pelage est plutôt sombre avec des variantes en fonction des espèces.

Les chauves-souris présentent une grande diversité de morphologies qui s’adaptent aux régimes alimentaires variés.

Vivant en Asie, la roussette d’1m70 de long est la plus grande.

En Thaïlande, la plus petite dite la chauve-souris bourdon fait 2 à 3 cm de longueur et pèse 2g.

Une santé de fer

Ce chiroptère a une durée de vie extraordinairement longue au regard de sa taille, une vie sans cancer ni autre maladie de vieillesse.

En France, notre pipistrelle fait 5 g et, avec ce poids plume, vit environ 2 à 3 ans !

La noctule commune de 17 à 45 g vit une dizaine d’années.

Le grand murin ne dépassant pas les 8 cm peut vivre 10 ans, voire 20 ans.

En 2005, des chercheurs ont capturé en Sibérie, un murin de Brandt bagué 41 ans plus tôt…

Les chauves-souris émettraient des mécanismes de ralentissement du vieillissement, si bien qu’il est impossible de définir l’âge d’un animal, une fois qu’il est adulte.

Par ailleurs, ces mammifères, porteurs de nombreux virus sans en être malades, sont capables de moduler leurs réponses immunitaires.

Elles parviennent à équilibrer la réponse antivirale et la réponse anti-inflammatoire.

Pour autant ne fantasmons pas, la chauve-souris n’a guère le secret d’une jeunesse éternelle ou bien même de l’immortalité et finit, comme tout vivant, par mourir un jour.

Salle consacrée à la chauve souris au Museum de Bourges - squelette

Un animal entouré de (trop) nombreuses légendes

Ayant eu la chance d’approcher de très près cet animal en le photographiant en centre de soin, je fus touchée par sa fragilité, son étrangeté indéniable, ce qui pourrait passer pour une forme de laideur, ces qualités le rendent extrêmement émouvant.

Dans le même temps, ce que je découvris de sa diversité, de sa richesse, de ses atouts, de ses capacités lors de ma visite de l’étage qui lui est consacré au Museum, força mon admiration.

Quel extraordinaire animal ! Et je pense à tout ce que l’on en dit, aux affabulations, mythes, fausses vérités venues du fond de nos campagnes et de nos âges…

Centre de soins pour chauve-souris - Museum de Bourges

Au regard de ses caractéristiques, de son aspect, la chauve-souris a généré bien des légendes dont elle continue de payer un prix immérité car la plupart de ces sentences sont absolument fausses.

Par exemple, elle ne suce pas le sang car ce n’est pas un animal vampire.

Si certaines espèces sont, en effet, hématophages, c’est-à-dire dans le langage commun, des chauves-souris vampires qui lèchent le sang et d’ailleurs ne le sucent jamais, la majeure partie des espèces ne l’est pas.

Sur les 1400 espèces recensées à l’échelle mondiale, les 34 sur notre territoire sont exclusivement insectivores et avalent tout ce qui est petit et qui vole, ingurgitant ainsi une quantité impressionnante de moustiques chaque année, d’où un rôle crucial pour l’environnement puisqu’elle permet de réduire l’usage de pesticides et que plus de 500 espèces de plantes dépendent de la pollinisation par la chauve-souris.

Ailleurs sur le globe, elles peuvent être frugivores, carnivores ou encore se nourrir de pollen, de nectar, préférer le poisson…

Enfin, la chauve-souris n’est pas aveugle et n’a aucune raison de s’accrocher aux cheveux de quiconque dans un mouvement de panique.

Elle voit le jour, donc mal la nuit certes, mais peut être éblouie par l’éclairage artificiel extérieur.

Pour circuler sans se cogner la nuit, elle utilise un sonar pour se repérer en faisant de l’écholocation, c’est-à-dire qu’elle émet un cri (une dizaine d’ultrasons à la seconde) qui va rebondir sur l’obstacle et revenir vers elle lui permettant ainsi de se faire une image mentale de ce qui l’entoure.

En fonction de l’espèce et de l’individu, ces cris, comble de sophistication, auront une forme.

Si nous ne pouvons pas entendre ses ultrasons utilisés pour se déplacer et pour chasser, en revanche, nous pouvons entendre ses cris sociaux, d’une fréquence plus basse, émis pour dialoguer, notamment avec son petit.

Une vie souvent menacée

Dans le Cher, le public, particulièrement sensibilisé grâce à l’action du musée, participe activement et n’hésite pas à prévenir des colonies existantes.

Car la chauve-souris n’est pas un nuisible, ni un rongeur, bien au contraire.

Ses petites crottes qui font un excellent engrais naturel pour le potager sont le seul désagrément de sa présence dans un jardin ou sur les murs d’une demeure.

Par contre, les menaces pour la vie et la survie des chauves-souris sont nombreuses telles :

– les éoliennes dont les vibrations provoquent une hémorragie interne dans le petit corps de la chauve-souris qui vient de passer entre deux ailes de l’éolienne, quand elle ne se fait pas tuer directement par une pale.

la réfection des bâtiments pour mieux les isoler, pendant laquelle on déloge les chauves-souris voire on les tue dans l’ignorance de leur présence tout simplement.

le chat qui peut, notamment, d’un coup de griffes abimer la délicate membrane du petit mammifère.

la pollution lumineuse qui éblouit l’animal et le perturbe.

– la déforestation

Un Museum pour défendre les intérêts de la chauve-souris

Ainsi, le Museum est sollicité sur un certain nombre de projets d’aménagements du territoire pour lesquels il défend les intérêts de la chauve-souris.

Par exemple, le Museum tente de sensibiliser les utilisateurs d’éoliennes sur le parcours du petit animal pour qu’ils respectent un temps d’arrêt de quelques minutes à la nuit complète lors de la reprise des activités nocturnes des chauves-souris au sortir de la période d’hibernation.

De même, la gestion de l’éclairage extérieur fait l’objet d’études de terrain au cas par cas.

Parfois, lorsqu’il s’agit d’éclairer un bâtiment public, le Museum conseillera le noir sur le quatrième pan de mur ou bien, d’éviter d’installer des lumières au sol.

Tout en préservant l’habitat de la chauve-souris, ce geste permet de réduire les coûts d’électricité s’inscrivant dans une logique environnementale.

De même façon, le Museum réalise de nombreux diagnostiques sur le terrain pour permettre de relever la présence ou l’absence d’un regroupement de chauves-souris lors de projets de rénovation thermique par l’extérieur et éviter ainsi que les animaux ne soient emmurés vivants.

Enfin, le Museum a créé un nichoir qui peut s’insérer dans les façades permettant ainsi le maintien de la colonie dans son lieu.

Mon Carnet de Notes

Museum d’histoire naturelle de Bourges – Les rives d’Auron 18000 Bourges – ouvert tous les jours de 14h à 18h et de 10h à 12h du lundi au vendredi durant les vacances scolaires de la zone B – Tel 02 48 65 37 34 www.museum-bourges.net museum-accueil@ville-bourges.fr Les expositions sont accessibles aux personnes à mobilité réduite.

A visionner :  Chauve-souris mon amour  un film réalisé par Pauline Horovitz. https://rutube.ru/video/c4186135992675c77b7eb2023dc95df0/

Ce reportage a été réalisé grâce à Tourisme & Territoires du Cher.www.tourisme-territoiresducher et à Bourges Berry Tourisme 21 rue Victor Hugo 18000 Bourges. Tel : 02 48 23 02 60 www.bourgesberrytourisme.com contact@bourgesberrytourisme.com

Vous pouvez retrouver l’intégralité de mes reportages en ligne : https://lesvoyagesdeberengere.com/reportages/

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