Le papier est un monde en soi qui, personnellement, m’accompagne dans les infinis détails de mon quotidien, aussi ma rencontre avec l’univers de la créatrice Valérie Hubert, graveur mais aussi collectionneuse de papiers dominotés, a-t-elle été un moment heureux.

Ancienne designer textile, et toujours sous l’influence de ce métier tant aimé, Valérie Hubert, petit bout de femme brune et volubile, passionnée par ses sujets de prédilection – les papiers dominotés et la gravure – me raconte ses affections de papiers en mêlant joyeusement l’une et l’autre tant tout cela, au fond, est lié ; le papier dominoté étant… de la gravure.

Collection papiers dominotés de Valérie Hubert

Une collection a toujours différentes origines, différentes racines propres à chaque collectionneur. La collection de papiers dominotés de Valérie n’échappe pas à la règle, elle unit son amour du motif, de la couleur, de l’art populaire français et de la rareté – les papiers dominotés sont souvent ignorés par les libraires eux-même… De surcroît, c’est une collection totalement involontaire. Ce qui signifie que jamais Valérie n’a eu l’intention de monter une collection mais que sa collection de papiers dominotés s’est monté par devers elle, au-delà… à son corps défendant…par amour et délectation du moindre objet acquis.

Collection papiers dominotés de Valérie Hubert

Vingt ans après l’achat de son premier livre recouvert de papiers dominotés et repéré par son compagnon de l’époque, dans un salon de livres anciens, Valérie s’est retrouvée avec ce qu’il a bien fallu nommer et considérer comme tel : une collection de papiers dominotés principalement centrée sur les papiers dominotés du XVIIIe siècle français dont elle a, depuis, réalisé un ouvrage « Les papiers dominotés, une collection particulière » et qu’elle présente souvent dans des lieux prestigieux tel le musée Médard à Lunel, en 2019.

Collection papiers dominotés de Valérie Hubert

Mais qu’est-ce qu’un papier dominoté ? En quelques mots, c’est une feuille de papier imprimée à l’aide d’une planche de bois et coloriée au pochoir. Il était, généralement, réalisé dans le format dit couronne (soit un A3) par le dominotier-cartier-imagier qui œuvrait dans de petits ateliers familiaux. Considérées comme l’ancêtre du papier peint, ces feuilles étaient imprimées d’un motif mis au raccord, c’est-à-dire qu’en les mettant côte à côte, on obtenait un dessin continu.

Collection papiers dominotés de Valérie Hubert

Les petits motifs servaient à recouvrir les livres en attente d’être reliés ou l’intérieur de boîtes, les motifs plus grands avaient l’ambition d’être utilisés comme des papiers peints et décoraient les petites alcôves, les paravents ou encore les intérieurs d’armoires. Le papier dominoté exista d’une façon certaine dès le XVIIe siècle et il connut son apogée dans la seconde moitié du XVIIIe siècle.

Collection papiers dominotés de Valérie Hubert

Ce papier dominoté accédant, dans sa simplicité, sa sobriété parfois, sa naïveté, à une réelle beauté très émouvante est une des sources d’inspirations de Valérie devenue graveur professionnel depuis 3 ans. Le choix de la gravure comme nouveau chemin de vie semble parfaitement logique au regard de son amour pour le papier dominoté gravé lui-même.

De fait, lorsqu’elle grave avec sa gouge sur le linoleum, Valérie marche un peu dans les pas des dominotiers et imagiers d’antan qui gravaient à la gouge leur planche de bois. Mais l’artiste varie ses plaisirs et alterne au gré de son inspiration la linogravure, les eaux-fortes, et l’aquatinte, mêlant parfois les techniques comme le linoléum sur aquatinte.

Voici un petit lexique du graveur pour que vous et moi puissions nous retrouver un peu dans ce bel univers :

La linogravure : consiste à reproduire un dessin sur une plaque de lino puis à graver cette dernière à l’aide de gouges de tailles différentes en fonction du rendu souhaité. Cela s’appelle la technique de la taille d’épargne que l’on peut, aussi, faire sur du carton et du bois.

Une eau-forte : consiste à graver le métal en taille-douce à l’aide d’un mordant chimique. C’est un procédé de taille indirecte puisque effectué par la morsure du métal par l’acide, contrairement à la taille directe avec outil comme avec la technique, évoquée ci-dessus, de taille d’épargne.

L’aquatinte : est aussi un procédé de gravure à l’eau-forte et sur laquelle on applique de la poudre de résine et que l’on plonge ensuite dans un bain d’acide.

Une gravure sur métal, peu importe la technique, se reconnaît à la cuvette qui l’encadre.

En tant qu’ancienne designer textile et donc coloriste, Valérie apporte la couleur à l’univers en noir et blanc du graveur, et une fascination récurrente pour le motif. Ainsi, elle aime la superposition des plaques, chaque plaque étant gravée pour une couleur à la fois.

Une gravure se réalise ainsi :

Au préalable, Valérie crée un dessin.

Ensuite, elle le reporte sur la plaque de lino avec des petites gouges qui gravent dans la matière.

Quand le report de son dessin est terminé, elle passe l’encre sur la plaque de lino gravée.

Elle imprime à la main sur une feuille de papier ou bien elle imprime sous presse dans un atelier spécifique.

Certaines de ses œuvres, axées sur le travail du fragment, sont le résultat d’un collage de différentes linogravures. Ce collage sera ensuite poncé, vieilli, retravaillé pour lui accorder ce supplément d’âme propre au papier ancien…

L’œuvre de graveur de Valérie subit les délicieuses influences de ses passions qui s’étendent outre le papier dominoté, aux faïences du XVIIIe siècle, aux reliquaires, aux dentelles, aux images populaires et à l’art populaire français en général. Elle crée ainsi un univers unique, contemporain et intemporel à la fois où la couleur est une véritable empreinte de modernité.

MON CARNET DE NOTES

Valérie Hubertpresdupont@bbox.fr – instagram : valeriehubert.paris ou presdupont

Il sera possible de voir et d’acquérir les gravures de Valérie Hubert lors de sa prochaine exposition du 21 au 23 février 2020 : Voyage et Poésie. Métiers des arts du livre. Salon Anima Libri. La Closerie route de Méron. 49 260 Montreuil Bellay. Vendredi 14h à 18h30. Samedi et dimanche 10h à 18h. Entrée payante.

A lire : Les papiers dominotés, une collection particulière. de Valérie Hubert. Préface de Philippe de Fabry, directeur du Musée du Papier Peint de Rixheim. Photographies Corinne Schanté-Angelé. 2016. Format 17×24 cm, 80 pages, 40 illustrations. 24 euros. Un livre didactique et personnel à la fois qu’il est possible d’acquérir directement auprès de la collectionneuse.

Vous pouvez retrouver l’intégralité de mes reportages en ligne : https://lesvoyagesdeberengere.com/reportages/

Vous aimez mon travail ? Permettez-moi de vous prévenir des prochaines parutions.